L’identité contemporaine est kaléidoscopique, fluide, plurielle. On parle des identités, comme on parle des fiertés, des solidarités. Et plus il y en a, mieux c’est !
En quête d’émancipation, des groupes se fédèrent selon leur couleur de peau, leur orientation sexuelle, leur « genre » et formulent leurs doléances, faisant valoir leur caractère minoritaire et victimaire. On invoque ses martyrs plutôt que ses héros. George Floyd plutôt que Vercingétorix.
Le wokisme sanctifie les persécutés, instaure des politiques identitaires et distribue prébendes, passe-droits, quotas et subventions. Ainsi l’identité devient-elle un levier de pouvoir. Mais que faire quand les revendications des uns et des autres entrent en conflit ? Dans un contexte de concurrence victimaire, chacun comptera ses troupes.
Trop d’identités tuent l’identité. Cette balkanisation de la population, dont l’intention affichée était de n’oublier personne, finit par entraver la cohésion sociale. Avec le culte des identités, s’éloigne l’idéal universaliste.
Sylvie Perez est journaliste. Elle a travaillé dans la presse écrite et à la radio. Elle a été membre de la commission Sciences de l’homme et de la Société du Centre National du Livre. Elle a publié plusieurs essais, romans et livres d’entretien, et traduit de l’anglais l’œuvre théâtrale d’Agatha Christie. Depuis 2011, elle vit à Londres où les débats d’idées lui ont inspiré son dernier essai En finir avec le wokisme – Chronique de la contre-offensive anglo-saxonne paru aux éditions du Cerf.